dimanche 21 août 2011

Chronique des Urgences Ordinaires

C'est souvent peu de choses, ça a l'air de rien, comme ça, au début, et puis ça se reproduit.
Jusqu'à devenir une sorte de routine acceptée à tous les niveaux.

Par respect du Secret Professionnel, je ne mentionne pas les lieux ni les dates.
Disons juste que ça s'est pas passé dans un Service d'Accueil des Urgences d'un Centre Hospitalo-Universitaire Parisien, il n'y a pas très longtemps.

C'est l'été, la permanence des soins, un joli concept sur le papier, montre ses limites :
les professionnels de Santé, un peu partout, sont en vacances, bien méritées.
Les soins de premier recours sont difficiles à trouver, faute de remplaçants.
Les lits d'aval sont également très rares, faute de personnel pour les faire tourner, la plupart des services hospitaliers est contrainte de fermer des lits l'été.
Il reste donc la consultation aux Urgences...



Vous savez, ce genre de service où vous pouvez recevoir dans la même heure un patient autiste de 17 ans qui pourrait bien avoir l'appendicite, avec une couverture sociale tout ce qu'il y a de plus minimale, une jeune fille de bonne famille très alcoolisée, un SDF qui veut une douche et un quadra très bien inséré socialement, qui travaille de près ou de loin pour le gouvernement, pour une crise d'hémorroïdes qui dure depuis 1 semaine.

Passons sur les motifs de consultation aux Urgences, il y a souvent beaucoup plus farfelu et nettement moins urgent. Les motifs qui comprennent un "je me suis dit qu'à cette heure-ci, j'attendrais moins" ou "j'ai besoin d'un vingt-quatrième avis" ou encore "j'ai mal au dos depuis 3 ans" sont particulièrement fréquents, et sans doute peu adaptés dans un Service d'Accueil des Urgences...
Revenons cependant sur le socle de l'Accueil des Patients aux Urgences.

1° L'Inscription :
Vous donnez votre Etat-Civil rapidement (comme c'est la base sur laquelle va reposer votre dossier, il faut quand même que ça soit bien fait)
Vous racontez ce qui vous amène à une Infirmière d'Accueil et d'Orientation.

2° La Régulation :
Cette Infirmière, en fonction de la gravité de votre Etat actuel ou de sa potentielle évolution vers un état grave, cote la gravité de votre problème médical.
C'est sur cette cotation que repose l'ordre dans lequel les patients sont vus : les plus graves d'abord, et ensuite, en fonction de l'heure d'arrivée...

3° Un délai d'attente plus ou moins long :


(sur le sujet, un excellent article : http://www.asclepieia.fr/2010/07/05/attente-aux-urgence/)

En fonction de cette gravité :
- soit vous recevez des soins très rapidement (les personnes suspectes d'avoir un Infarctus du Myocarde, les personnes dans le Coma, celles qui font un Accident Vasculaire Cérébral, ...),

- soit vous recevez des soins rapidement (les personnes qui ont généralement une lettre de leur Médecin Traitant qui les adresse aux Urgences pour un problème bien particulier, les personnes dont l'état laisse supposer qu'une prise en charge rapide est nécessaire),

- soit vous recevez des soins dans un délai un peu plus long (la gravité de votre problème médical, au moment de votre inscription, rend raisonnable de faire passer des patients dans un état plus grave avant vous).

4° Les soins :
Ils sont donnés à toute personne, en fonction de ses besoins, sans aucune autre considération.

C'est un système qui a ses limites, la principale étant souvent le délai d'attente, dans des conditions qui ne permettent souvent pas à la cinquantaine de patients qui attendent, d'être installés dans de bonnes conditions.
Précisons d'ailleurs, qu'au temps d'Hippocrate, au 5ème siècle avant Jésus-Christ, les salles d'attente pouvaient contenir, dans leurs petites alcôves, environ 80 personnes...

Bonant Malant, en tout cas, ce système est plutôt bien accepté par la plupart des consultants, chacun se disant que le jour où il aura vraiment un état très grave, il sera bien content de passer avant les autres...




Pourquoi alors cet article ?
Parce que parfois, certaines personnes se croient au dessus du lot, ne se sentent pas dignes d'attendre au milieu de la souffrance et de la détresse, remettant en cause l'organisation des soins et surtout le contrat social, qui veut que vous cotisiez selon vos revenus et que vous receviez des soins selon vos besoins...

Et c'est donc récemment que les services de l'Elysée ont demandé à la Direction de l'Hôpital de faire passer prioritairement un patient ayant un problème d'hémorroïdes, désorganisant volontairement les soins...
Dans le même temps, un patient autiste de 17 ans a attendu presque la journée entière pour avoir un examen radiologique par Scanner...

Je n'ai pas eu la chance de l'examiner, ce patient, mais j'aurais volontiers exprimé ma façon de penser : les délais d'attente qui s'allongent aux Urgences, avec des consultations qui s'enchaînent à la vitesse de l'éclair, les difficultés à trouver des lits d'aval, sont justement le résultat de la politique libérale qui confond "Economie de la Santé" et "Economies dans la Santé".

C'est d'autant plus tragique que, ceux qui la mettent en oeuvre, cette politique libérale visant à confier, à terme, l'Assurance Maladie à des Assurances Privées (cf ici), se réclament du Gaullisme.
Or, le Gaullisme, c'était justement tout sauf ça... C'était plutôt ça, Programme du Conseil National de la Résistance, et ça avait une autre allure !

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